LE DERNIER VOYAGE

Un trio en vadrouille sur une mobylette, avec une fille bien calée entre deux garçons, pour tuer l’après-midi ? La vérité est tout autre, hélas ! Ce sont les frères Narendra et Ramesh qui conduisent leur maman décédée du Covid sur un lieu d’incinération. Ça fait froid, n’est-ce pas, bien qu’on soit en Inde , et que ça affiche dans les 30° au thermomètre. Et bien voyez-vous, le tabloïd voyeur ne réussit pas sur ce coup là à me mettre le blues. Je n’en dirais pas autant de la photo d’un vieillard transportant sa femme morte sur son vélo, et qui la perd en chemin. Celle-là, je vous l’épargne ! Mais pour ce qui est de ce périple à mobylette, cette scène surréaliste me fait curieusement chaud au cœur, même s’il n’est pas question de dédouaner ce pays à bombe atomique incapable de contrôler la bête et d’assurer une fin décente à ses habitants. Même pas une ambulance pour transporter le corps de la défunte, pas de corbillard évidemment, et même pas un transporteur à brouette. Il fallait bien que les fils assurent ! Et la maman ? Ah, si on pouvait faire parler Maman ? Pensez-vous qu’elle n’aurait pas  préféré ce dernier voyage de cette façon, bien calée entre ses deux fistons, l’un derrière et l’autre devant, elle qui leur disait toujours de faire gaffe de ne pas se planter avec la bécane. Croyez-vous qu’elle aurait préféré passer deux à trois jours dans un tiroir même pas réfrigéré puis transportée ensuite dans une camionnette cahotante et bringuebalante lui cassant le dos. Non décidément, ce scénario à mobylette ne me laisse pas forcément amer surtout lorsqu’on a vu par chez nous en cette année funeste bien des morts du covid privés de leurs proches pour leur départ. Allez, roulez jeunesse et paix aux cendres de la Maman !